La définition greenbergienne du modernisme

⇒ article modernisme.

« Le ne s'attache pas seulement à l'art et à la littérature. Il touche désormais presque tout ce qui est véritablement vivant dans notre culture. Il se trouve qu'historiquement, c'est aussi un phénomène assez nouveau. La civilisation occidentale n'est pas la première à faire halte et à s'interroger sur ses propres fondements, mais c'est elle qui aura poussé ce processus le plus loin. J'assimile le modernisme à l'intensification, presque à l'exacerbation, de la tendance à l' dont l'origine remonte à Kant. Parce qu'il fut le premier à critiquer les moyens mêmes de la critique, je fais de ce philosophe le premier vrai moderniste.
L'essence du modernisme, à mon avis, c'est d'utiliser les méthodes spécifiques d'une discipline pour critiquer cette même discipline, pas dans un but de subversion, mais pour l'enchâsser plus profondément dans son domaine de compétence propre. […]
Ce qu'il fallait manifester et rendre explicite, c'est ce que non seulement les arts en général, mais chaque art en particulier, avaient d'unique et d'irréductible. À travers les opérations qui lui étaient propres, il incombait à chacun de déterminer les effets qui n'appartenaient qu'à lui.
Il apparut vite que le domaine propre et unique de chaque art coïncidait avec tout ce que la nature de ce avait d'unique. Le rôle de l'autocritique devint d'éliminer de chacun tous les effets qui auraient pu éventuellement être empruntés au médium, ou par le médium, d'un autre art. Ainsi chaque art redeviendrait “ pur ” et dans cette “ pureté ” trouverait la garantie de sa qualité et de son indépendance. “   ” signifiait “   ”, et l'entreprise d'autocritique en art devint une entreprise d'autodéfinition passionnée » (C. Greenberg, “ La peinture moderniste ”, p. 33-34).

Denys Riout

© Le Seuil / Dictionnaires le Robert, 2019.